Juritravail
Il existe diverses façons de mettre un terme au contrat de travail : par une rupture conventionnelle, un licenciement ou une démission. Ce sont des modes de rupture du contrat différents qui ne relèvent pas de la même initiative. Quelles sont ces différences ? Quelles étapes respecter pour chacune des ces procédures ? Quel coût pour l'entreprise (indemnités) ? Quelles conséquences pour le salarié (droit au chômage, préavis...) ? La signature d' une rupture conventionnelle est-elle plus avantageuse ? Nous comparons les trois situations et nous vous proposons une illustration concrète.
Les différences entre ces modes de rupture du contrat de travail que sont le licenciement, la démission et la rupture conventionnelle (rupture amiable négociée par les 2 parties) sont prévues par le Code du travail, qui définit, pour chacun d'entre eux, un régime juridique différent (motif de la rupture, entretien, indemnisation, préavis, allocations chômage versées par Pôle emploi ou anciennes ASSEDIC …).
La convention collective applicable à l'entreprise joue également un rôle important car elle peut prévoir des dispositions plus avantageuses que la loi au profit du salarié. Elle peut, par exemple, envisager le versement d'une indemnité de départ pour le salarié alors que la loi ne le prévoit pas. C'est également elle qui fixe la durée du préavis à exécuter par le salarié (ou par l'employeur si c'est lui qui rompt le contrat de travail).
Par conséquent, il est indispensable, que vous soyez salarié ou employeur, de consulter systématiquement votre convention collective avant de rompre le contrat de travail.
Pour comprendre les différences qui existent entre la rupture conventionnelle, la démission et le licenciement, prenons un exemple concret :
M. Martin, employé en CDI, relevant de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (3018, (Syntec-Cinov) dont le salaire mensuel moyen brut sur les 12 derniers mois est de 1.800 euros et qui a 9 ans d'ancienneté. Quelles seront les conséquences pour lui et son employeur, selon le mode de rupture choisi ?
Attention, ces dispositions s'appliquent uniquement aux salariés et aux employeurs qui sont liés par un CDI dont la période d'essai est terminée. Des dispositions spécifiques sont mises en place pendant la période d'essai du CDI ainsi qu'aux CDD.
| Démission | Licenciement pour motif personnel | Rupture conventionnelle |
Définition | La démission est l'acte par lequel le salarié rompt son contrat de travail | C'est l'acte par lequel l'employeur rompt le contrat de travail de son salarié pour un motif autre qu'économique (insuffisance professionnelle, faute, inaptitude …) | C'est une procédure qui permet au salarié et à l'employeur de décider, d'un commun accord, de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée |
Initiative de la rupture | Le salarié | L'employeur | Le salarié et l'employeur |
Nécessité de justifier d'un motif de rupture | Non | Oui Le motif de la rupture est indiqué dans la lettre de licenciement | Non |
Nécessité pour l'employeur de réaliser un entretien avec le salarié | Non | Oui (1) L'employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable | Oui (2) |
Nécessité d'un écrit formalisant la rupture | Non En revanche il est vivement conseillé, pour des raisons de preuve | Oui (3) L'employeur doit adresser une lettre de notification du licenciement au salarié Modèle de lettre conseillé : Licencier un salarié pour faute |
Oui Une convention de rupture amiable est négociée et signée par l'employeur et le salarié Modèle de lettre conseillé : Demander une rupture conventionnelle |
Préavis à respecter | Oui (4) La durée dépend de votre convention collective et de votre statut (cadre ou non cadre) Vous voulez démissionner sans préavis (ou avec un préavis réduit), car vous êtes en arrêt maladie ou vous voulez vous rapprocher au plus vite de votre conjoint ? C'est parfois possible ! Modèle de lettre conseillé : Démission avec demande de dispense de préavis Pour M. Martin : 2 mois | Oui, sauf faute grave ou lourde (5) La durée dépend de votre convention collective et du statut du salarié (cadre, employé, agent de maîtrise...)
Pour M. Martin : 2 mois | Non, sauf si les parties décident qu'il y en aura un. La rupture intervient au plus tôt le lendemain de l'homologation de la convention (délai de rétractation de 15 jours puis 15 jours pour homologation) (6) |
Indemnités de rupture que l'employeur doit verser au salarié | Non L'employeur doit toutefois lui verser une indemnité compensatrice de congés payés, c'est-à-dire les congés acquis mais non pris par le salarié | Oui, sauf faute grave ou lourde (Ces 2 cas de rupture donnent tout de même droit à l'indemnité de congés payés) Le montant dépend de votre convention collective "L'indemnité de licenciement se calcule en mois de rémunération sur les bases suivantes : pour une ancienneté acquise entre 2 ans et 20 ans : 0,25 mois par année de présence", soit 1.800 x 0,25 x 9 = 4.050 euros Pour M. Martin : 4.050 euros (7) | Oui Le montant ne peut être inférieur au montant de l'indemnité légale de licenciement Si l'indemnité conventionnelle de licenciement est plus élevée, l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle ne peut être inférieure à cette dernière (certaines entreprises ne sont pas concernées par cette disposition) (8) |
Droit aux allocations chômage pour le salarié (Assedic) | Non, sauf cas de démission légitime qui permet de toucher le chômage | Oui | Oui |
Possibilité de contester la rupture du contrat devant le juge | Oui, par exemple en cas de démission équivoque c'est-à-dire qu'elle n'est pas du plein gré du salarié (démission forcée, en cas de harcèlement, en raison de mauvaises conditions de travail …) Dans ces circonstances, la démission peut être requalifiée en prise d'acte | Oui Le licenciement peut toujours être contesté devant les juges dans un délai de 2 ans depuis le 17 juin 2013 (auparavant 5 ans) Le salarié peut obtenir des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou licenciement nul | Oui, la convention de rupture peut être annulée. Le salarié dispose d'un délai de 12 mois à compter du jour de la rupture pour agir. Elle produit alors les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse |
Employeurs ou salariés, si vous ne savez pas quoi faire, n'hésitez pas à faire appel à un professionnel qui pourra vous aiguiller dans votre choix, en toute sécurité.
Attention !!
Le décret n°2017-1398 du 25 septembre 2017 portant revalorisation de l'indemnité légale de licenciement publié au Journal Officiel du 26 septembre 2017 vient modifier le calcul de l'indemnité légale de licenciement (9).
Dorénavant, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :
- 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans ;
- 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans(10).
- soit la moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant la rupture du contrat ou, lorsque l'ancienneté du salarié est inférieure à 12 mois, la moyenne mensuelle de la rémunération des mois précédant la rupture du contrat ;
- soir le 1/3 des 3 derniers mois (primes, gratifications exceptionnelles ou annuelles sont prises en compte au prorata du temps de présence).
Références :
(1) Article L1232-2 du Code du travail
(2) Article L1237-12 du Code du travail
(3) Article L1232-6 du Code du travail
(4) Article L1237-1 du Code du travail
(5) Article L1234-1 du Code du travail
(6) Article L1237-13 du Code du travail
(7) Convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, IDCC 1486
(8) ANI 11 janvier 2008 modifié et Intr. DGT n°2009-25 du 8 décembre 2009
(9) Décret n°2017-1398 du 25 septembre 2017 portant revalorisation de l'indemnité légale de licenciement
(10) Article R1234-2 du Code du travail
(11) Article R1234-4 du Code du travail